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Un clocher. Au-dessus d'une église. Dans un village. Autour, des gens, des vies, des souffrances, des peurs de souffrir de nouveau, des joies, des plaisirs. Dans des maisons, des immeubles, à plusieurs, chez soi. Des liens, des cordons même. On se souvient. On n'oublie pas. On n'oublie rien de rien, on s'habitue, c'est tout disait Jacques Brel!
Mais si, au lieu de s'habituer, on se souvenait, on digérait, on pardonnait! On acceptait! L'oubli viendrait et on serait plus léger, n'avoir plus ces boulets aux pieds!
Dans ce village, il y a une belle jeune fille, naïve. Elle aime plaire, séduire même. C'est dans sa nature, elle en a besoin. Elle sourit facilement, un peu trop peut-être. Elle aime être gentille. Elle veut qu'on l'aime. Dans les bals du samedi soir, elle danse, c'est tellement grisant, danser. Les jeunes hommes se disputent ses faveurs. C'est à qui arrivera le premier pour la prochaine danse. Elle n'a pas envie de jeter son dévolu sur l'un ou sur l'autre, elle préfère garder cette cour, entretenir ses soupirants. Elle danse, légère, heureuse, pleine d'espoirs, avec l'envie que la vie reste une danse, toujours.
Mais les duègnes, les jaloux, les concupiscents ne le voient pas de cet oeil! Et la rumeur s'y met. Cette jeune fille n'est pas sérieuse. Ah oui, je l'ai vue avec Pierre. Tiens, moi je l'ai aperçue avec Jacques! Non, est-ce possible, figure-toi qu'hier soir elle parlait avec Jean! Pierre, Jacques, Jean, elle n'est pas sérieuse, c'est un fait. Tu ne trouves pas qu'elle prend du poids? Tiens, c'est vrai, elle est peut-être enceinte? Tu sais la dernière, il paraît qu'elle est enceinte! Et avec tous ses soupirants, elle ne sait même pas qui est le père? C'est scandaleux!
La jeune fille, elle, ignore tout. C'est sous ce clocher, dans ce village, que court la rumeur! Tiens, le père, c'est vrai que ta fille est enceinte? C'est qui le père? Le père de la jeune fille, furieux, lui rapporte la rumeur. Là, elle tombe, elle s'écroule même, elle reçoit un coup de poignard dans le coeur. Elle prend contact avec la dure réalité du monde. Pourtant, elle avait juste échangé un premier vrai baiser avec Jacques... Pourquoi tant de méchanceté? Elle est marquée...
Longtemps, longtemps après, elle s'en souvient. La plaie se rouvre facilement quand la rumeur s'y remet pour raconter d'autres histoires. Et puis, un jour, elle choisit de ne plus souffrir.
S'habituer, non! Accepter. Elle avait sa part de responsabilité dans cette affaire. Le plaisir, la joie de vivre, c'est indécent? Ça se paie en rumeur. Les autres ont peut-être été le miroir de ses croyances profondes. Etre aussi insouciante, légère, joyeuse, ce n'est pas possible, la vie, c'est plus dur que cela. Le bonheur ça se mérite, et patati et patata.
Alors, la vie lui a prouvé qu'elle avait raison, ses pensées sont devenues réalité...
Peut-être qu'ils étaient malheureux, les autres, de n'avoir pas cette joie de vivre, cette légèreté? Ils souffraient?
Peut-être aussi qu'ils n'en avaient rien à faire, que le mal engendré par cette rumeur, ils n'en étaient pas conscients?
Le jeune fille, devenue femme, a le droit de croire ce qu'elle veut, continuer à se faire du mal en n'oubliant rien ou accepter sa responsabilité, pardonner, enlever le boulet de son pied. A partir de là, la rumeur se taira... pour cela en tout cas.
Christiane Kolly
1998
Vuisternens-en-Ogoz
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Viens près de moi
Je vais te regarder
Et plonger mes yeux dans les tiens
Viens près de moi
Je vais te respirer
Et m'imprégner de ton parfum
Viens près de moi
Je vais te toucher
Et connaître de ta peau le grain
Viens près de moi
Je vais te serrer
Et sentir ton coeur contre le mien
Viens près de moi
Je vais t'enlacer
Et tu verras nous serons bien
Viens près de moi
Je vais t'embrasser
Te donner mille baisers au moins
Viens près de moi
Je vais t'aimer
Et mettre ma main dans ta main
Théa d'Albertville
Romont
18 février 2012
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A 10 ans vous ne m'aimiez pas
J'étais petite et dans la lune
Malgré mes efforts de diva
Vous me trouviez bien importune
A 15 ans vous m'aimiez un peu
Je commençais à devenir
La femme qui se prête au jeu
De la séduction, c'est peu dire
A 20 ans m'avez épousée
Pour que puisse la vie renaître
Sans décider, mais bien pressé
D'être père de l'enfant à naître
A 25 ans m'avez heurtée
Partager c'était bien trop dur
M'avez même un peu rudoyée
Et j'ai filé à toute allure
A 30 ans on dit le bel âge
Tout en train de me reconstruire
Vous me faisiez bien des hommages
Je n'ai rien vu, j'étais en ire
A 35 ans vous m'aduliez
Rêviez tous de moi dans vos lits
Mais moi j'étais encore coincée
Ne pouvais être qu'effigie
A 40 ans le grand amour
Le vrai le beau le partagé
Comme la foudre pour toujours
Je le croyais avait frappé
A 45 ans j'ai laissé
Ce rêve de partage éternel
Puisque vous étiez marié
Et êtes resté avec elle
A 50 ans je vous ai vu
Vous l'amant, l'ami voire le père
Et vous m'avez aidée guérie
De cette fratricide guerre
A 55 ans m'aimez moins
Ou plus pour les mêmes raisons
Un petit tour entre mes mains
Ou deux ou trois et puis s'en vont
Que seront-ce mes 60 ans
Moi qui encore aime séduire
Resterez-vous ami amant
Pour le meilleur et pour le pire
Vous, l'homme
Théa d'Albertville
9 janvier 2012
Dans le train vers Romont
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Je suis là assise à ma table
Et j'ai terminé mon festin
Je me rends compte insatiable
Que de cela n'avais point faim
Mais de baisers et de caresses
Que m'aurait donnés mon amant
Sur les joues les seins ou les fesses
Avec ferveur passionnément
Théa d'Albertville
8 décembre 2011
Lausanne
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L'objet de mon amour est caché au fond d'un bois. Il sort la nuit, par un passage secret et exprime sa puissance, son désir de pénétrer le monde, mais pas trop loin, le monde est dangereux.
Alors il retourne au fond des bois. Il se protège. Il a dû livrer bien des batailles. Il reste des traces, des déchirures. De ses blessures, à peine fermées, se perçoit encore la douleur. La cicatrisation prend son temps. C'est pour cela qu'il a mis autour de sa demeure plusieurs rangées d'obstacles et de barricades. Plus loin, il y a une forêt profonde avec de grands arbres qui, la nuit, ressemblent à des monstres aux airs de vieilles femmes folles. Le sol est couvert de ronces qui griffent celles qui tentent de s'approcher. Le terrain n'est pas plat, à chaque pas vous risquez de mettre le pied dans un trou et, alors que vous croyez y avoir échappé, vous trébuchez sur une racine qui voudrait bien voir le soleil.
Moi, Merline, avec ma baguette magique, je peux transformer cette forêt en un petit chemin de campagne bordé d'un ruisseau où poussent des primevères au printemps. Aucun effet mon pouvoir, ce n'est pas mon chemin. C'est la vie de Merline, voir, sentir, avoir cette intuition et accepter de ne pas pouvoir y changer grand chose sans la volonté ou la permission de l'homme blessé.
Par bonheur, il a laissé un passage pour les mots et les images, unidirectionnel la plupart du temps. Alors moi, Merline, je lui envoie un peu de baume, je fais des tentatives pour qu'il s'ouvre vraiment au monde, pour qu'il sorte du bois.
Mais qui suis-je au fond, pour savoir ce qui fait son bonheur ? Il vit peut-être dans un havre de paix que je ne connais pas ? Serais-je simplement intéressée de le connaître, de le savoir ou de l'apaiser ?
Théa d'Albertville
Pully
2 décembre 2011
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Il est 4 heures. J'ai conscience de cette nouvelle journée depuis un moment déjà.
Ma chatte est réveillée, présente au monde... J'ai les jambes ouvertes largement, elle salue l'univers.
Elle est gonflée... Il lui faudrait une bouche, gourmande, assoiffée, parce qu'elle a besoin d'être bue...Une langue aussi, il lui faudrait une langue, active, voyageuse, spéléologue, curieuse de son environnement, qui rampe avec gourmandise.
Elle a faim, faim d'être envahie, d'être visitée, d'être prise, de sentir la chair caressante d'un membre, la tête chercheuse de son point de jouissance.Il la visite. D'abord avec une douceur, une lenteur de paresseux. Il gonfle, il durcit, il s'excite. Il en devient pressé, il sait que le plaisir va bientôt passer. Il sait que ça l'apaise, que ça le rend calme.
Mais où est le coeur ? Où est le reste du corps ? Où est la tête ? Ma tête, elle est là, oui ! Mon coeur aussi. Le reste de mon corps aussi.
Mais l'autre être, celui a qui appartient ce sexe ? Ah oui, il est à deux mille cinq cents kilomètres...
Alors, je me lève. Je lave mon corps, je le frotte... Je le couvre de vêtements et d'une giclée de L'instant de Guerlain. Et je poursuis mon chemin.Je suis vraiment une égoïste, je n'ai pensé qu'à moi ! J'assume... Et ce matin, pour combler un autre besoin, celui de donner, je m'offre un autre voyage.
Je suis la Criblette. Je m'élève au-dessus de Lausanne. Il me faut de grands battements d'ailes pour voir le soleil, là où il est si bon, si chaud, si fort de voler.
Direction sud est, en avant toutes...Je descends, je fends le vent... Ma boussole intérieure m'indique l'endroit... Il est là... Je reconnais l'objet de mon désir. Magnifique, il dort encore...
Je redeviens femme et observe. Comme il est beau dans son sommeil, relâché, posé, offert... Je me glisse à ses côtés... Je le respire, je le hume, je l'inspire... avidité, convoitise, concupiscence, lubricité même... J'entreprends de l'éveiller... Ma bouche se promène, longe la vallée de son dos, laisse au passage ce quelque chose d'humide qui le fait frissonner... Il bouge...Il reçoit, il sait recevoir, magnifique... Je continue mon exploration. Je découvre sa virilité qui a commencé à se réveiller... J'ai faim de le goûter, je le prends dans ma bouche, comme si je voulais l'avaler, entre douceur et fermeté... Mes mains poursuivent leur exploration, se promènent sur son anatomie... et découvrent ce corps, matérialisation de mon désir de mâle.
Il est à demi réveillé... Voyons le côté face... Je le tiens par les deux hanches et pose, pose et repose mes lèvres sur son ventre, visite son nombril... Intrusion !
Ce que j'aime ce voyage ! Et je sens que mon application va bientôt être récompensée... Je continue mon escalade, vers le sommet, arrêt intéressé sur les mamelons dressés.
Les aisselles, j'adore explorer les aisselles, j'y promène mon nez, mes narines se dilatent de toujours plus d'un désir animal...
Je sens sous moi l'effet de mon amoureuse concentration. Le sommet est proche... Je glisse la tête dans son cou, ses deux bras prisonniers de mes mains... Il est présent, il accepte, il reçoit, il sait recevoir, cadeau...Avec un grande douceur, j'approche ses lèvres... sensuelles, elles sont si sensuelles, je les happe, je les hume, je les embrasse...
Je n'en peux plus... Je le veux... Je le prends... Je le chevauche, je m'empale en même temps que ma langue fait irruption dans sa bouche, avec douceur et détermination...
Quelle sublime sensation... Je commence alors une danse ancestrale... Fusion, ce que j'aime cette fusion... Accouplement des corps, délices, je glisse...
Non, encore... et encore... ça gronde au fond de mon ventre. Toutes les colonnes de mon temple tremblent... je maîtrise, je maîtrise... plus pour longtemps !
Le gisement se donne... Le filon prend le temps de s'épuiser... Je reçois chaque goûte...Je m'apaise... reprends mon vol... et rentre à la maison.
Théa d'Albertville
16 novembre 2011
Lausanne
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Une brume légère voile le bleu Léman
et je pense à vousUne fumée s'échappe d'une cheminée
et se frotte le ventre sur les tuiles d'une maison
et je pense à vousLa neige a recouvert les sommets somptueux
et je pense à vousDes gouttes de pluie glissent lentement sur les vitres
et je pense à vousUn peuplier fier se dresse dans le gris du ciel
et je pense à vousLes arbres se dévêtent, leurs feuilles
jaunes oranges ocres rouges tombent sur le sol
et je pense à vousUn chat se toilette avec une sensuelle application
et je pense à vousUn train passe, puis disparaît dans un tunnel
et je pense à vousUn avion va quelque part
et je pense à vousSeigneur, mais je ne fais
que penser à vous !Théa d'Albertville
4 novembre 2011
Lausanne
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